Vingt ans après les débuts d'IAM, Akhenaton se raconte dans « La Face B » : ses origines de petit-fils d'immigrés napolitains, son initiation hip-hop new-yorkaise d'ado 80's, et toute l'aventure du groupe marseillais.
« Sud Ouest ». Cet autoportrait dit-il tout ?
Akhenaton. Oui, il explique mon parcours et ma passion pour la musique, avec des éléments de la sphère privée qui les ont directement impactés. L'entretien avec Éric Mandel était plus personnel mais j'ai choisi d'occulter les passages intimes qui risquaient de nous faire déraper dans le people. Le propos devait rester factuel et seulement éclairer mon parcours d'homme et de chanteur d'IAM.
Quel souvenir gardez-vous du premier live ?
C'était au début des années 1990, à Poitiers. Je donnais déjà les interviews pendant que les autres s'amusaient. Je râlais : « Si vous ne venez pas maintenant, vous verrez que plus tard on ne voudra que moi. » C'est primordial de parler ensemble de tout, ça fait progresser. L'échange sert aussi à lâcher un peu de pression dans la marmite. Par exemple, Imothep portait tout le matos, le pauvre. Et nous, comme des clébards, on le laissait galérer. D'où sa fameuse réplique : « Je croyais avoir des amis, c'était juste des collègues de travail ! » (sourire)
À Bordeaux, apparaît alors Tribal Jam…
Moïz, qui chante sur « Où va la vie », un inédit de l'anthologie IAM, et pour mon album solo, « Dans la cité », c'est quelqu'un d'extra. Musiques de nuit nous a vite fait venir ici. On animait des ateliers à Cenon, Pessac, Lormont, des activistes nous programmaient au Cap-Ferret, avant même la sortie de notre première cassette. Pour le style new jack français des Tribal, c'était peut-être trop tôt. L'heure était à un rap et à un rock assez radicaux, notamment dans les textes. On l'accepte mieux désormais.
Quels parallèles existait-il entre IAM et le rock alternatif ?
Au-delà des différences de style, il y avait beaucoup de respect et d'amour entre gens de conviction. Pas des barbapapas qui ne seraient là que pour des raisons d'argent… Il y avait l'affirmation de caractères forts, pour qui les idées émises doivent être entérinées puis appliquées. Quand tu te construis sur des valeurs, par moments, ça clashe forcément. Par exemple, en minorité sur le fait d'aller sur une major, j'ai suivi l'avis général, sans me priver ensuite de le leur rappeler. Mais je ne regrette pas un instant d'avoir suivi, sinon on joue solo.
Justement, les concerts solos se précisent ?
Ils resteront ponctuels. En fait, chacun injecte désormais ses morceaux solosdans le set d'IAM. Les films et autres projets entrepris séparément ne posent aucun problème. Mais si l'un de nous partait en tournée pour six mois, hors groupe, ça deviendrait compliqué. Donc, on garde l'exclusivité du live à IAM…
Avec les 15-16 albums réalisés en tout, chacun aurait dans sa play-list au moins cinq ou six répertoires possibles… On a beau avoir joué 8 milliards de fois les titres en concert, ça bouge encore. Le public germanophone de Zurich chantait « Chez le mac », joué depuis 1997, avec le refrain alternatif sur Curtis Mayfield, à la bonne tonalité et juste… On n'en revenait pas.
Que sera le weblabel, et pourquoi n'avoir inclus aucun inédit sur les compilations ?
Il ne s'agit pas d'un problème de créativité mais de budget. On a accumulé 178 morceaux qui n'ont jamais été publiés. La compil d'IAM et la mienne sortent sur une ancienne maison qui travaille un catalogue. Sortir des inédits, ça voudrait dire dépenser pour mixer et mastériser…
Me-label proposera des morceaux par abonnement qui n'existeront sur aucun autre support. Nous mettrons en ligne un titre par mois, en 12 pistes pour avoir accès aux différents instruments, caisse claire, trompette, etc. Si tu kiffes la basse, tu peux la monter ; si tu veux une version instrumentale, tu supprimes la voix. C'est ma fierté : on continue à faire de la musique sans larmicher sur la crise ni attendre l'aumône des grands groupes… qui ne viendra pas.
Où en est IAM côté maison de disques ?
On ne veut pas signer ce qui nous a été proposé. La crise a bon dos pour tenter d'imposer des contrats de merde aux artistes. Comme dans l'entreprise, on te menace avec les dix qui peuvent te remplacer. La droite a fait sa révolution, non pas dans la rue mais avec les armes du pouvoir : l'euro, la propagande d'après-11 Septembre. Insidieusement, avec la télé et tout ce qui l'accompagne, elle a instauré la peur, la caricature, la méfiance des autres, et ça fonctionne. On peut devenir de droite sans s'en apercevoir, se retrouver UMP en se réveillant… Mais vu ce que vaut un socialiste en ce moment, il n'y a pas de débat. Les politiques sont toujours dans le calcul. Nous, on peut juste dire la vérité et ce qu'on pense, que ça plaise ou pas.
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