mercredi 16 juin 2010

Archive: interview IAM (époque L'Ecole du Micro d'Argent) dans le magazine XL

Dans leur dernier disque, l’Ecole du micro d’argent, IAM nous balade de Marseille à New-York, de Star Wars à Shaolin. Des thèmes dont Akhénaton et Shurtik’n nous parlent en freestyle. Les cités marseillaises Akhénaton : Depuis qu’on a commencé, la vie s’est dégradée dans les quartiers. Surtout chez les plus jeunes. Comme le dit la Funky Family (un groupe de rap de Marseille, NDLR) : " La jeune génération arrive sans pitié, mouss (couteau) dans la poche et les couilles accrochées. " Maintenant, tu ne tapes plus le ballon avec eux. C’est tout pour l’apparence et le fric : à 16 ans, il faut que tu sois en Versace ou dans des fringues à 3 000 balles. Quand tu es traité comme un chien, tu te dis qu’en t’affichant ainsi, on te respectera. Résultat : plus de haine d’un côté, plus de répression de l’autre. A Marseille, on frôle l’occupation policière. Même si c’est inquiètant, on a l’espoir que ça s’améliorera. A condition que ceux qui ont les moyens de construire quelque chose de bien s’y mettent vraiment. Les jeunes, il suffirait juste de leur proposer pour qu’ils changent.

L’Afrique

Akhénaton et Shurik’n : Ca reste pour nous le coeur de IAM et surtout la mère de toutes les musiques. C’est ce qu’on racont dans Libère mon imagination. Regarde les griots, qui colportent et chantent les mémoires des dynasties d’Afrique de l’Ouest. C’est un peu les ancêtres des rappeurs. On part d’ailleurs à Dakar pour préparer une compilation de rap sénégalais. On y mettra en place des stages de sampleurs et de DJ. Là-bàs, le rap explose. Ils ont le rythme et la tchatche. Il leur manque juste les moyens technologiques. Mais le jour où ils les auront, on te garantit que Dakar sera une des grandes capitales mondiales du rap.

Momo

Shurik’n : Je parle de lui dans Demain, c’est loin, notre nouveau morceau de référence. Il dure plus de 8 minutes et c’est un peu notre Message (célèbre hit du hip-hop américain au début des années 80, NDLR). Pour revenir à Momo, c’était l’aîné à l’époque où j’étais encore dans une troupe de break-dance. Il m’a donc vu grandir, et on ne s’est jamais perdu de vue. Jusqu’au jour où j’ai appris qu’il était mort d’une overdose.

Le temple du Shaolin

Shurik’n : La première fois que j’en ai entendu parler, c’était il y a 11 ans, je commençais les arts martiaux. Lorsque j’ai commencé à écrire des raps, ça a donc influencé la philosophie de IAM. D’autant que les arts Martiaux et les arts Marsiens, c’est-à-dire venant de Marseille, ça sonne bien ensemble! On a d’ailleurs notre figure : la mouette! C’est de là aussie que j’ai tiré mon pseudo, Shurik’n, une arme de jet utilisée dans le kung-fu. Mais il ne faut pas se limiter à l’aspect mlitaire de cette période de l’histoire chinoise. Pour les Chinois, les moines de Shaolin représentent un art de vivre fait d’intégrité et de respect. J’espère que des gens pourront découvrir la philosophie taoïste.

Dark Vador

Akhénaton : Il influence notre rap L’empire du côté obscur. Normalement, on pense que Luke Skywalker est la figure emblématique de Star Wars. En fait, ce n’est qu’un blond aux yeux bleus, nouveau cow-boy du style John Wayne. Le gendre parfait. Le vrai génie, c’est Dark Vador. Non seulement parce que tu ne vois jamais son ragard et qu’il n’utilise jamais physiquement la force, mais surtout parce que c’est le seul à te montrer l’infime frontière qui existe entre le bien et le mal. Dark Vador est la preuve que des le blanc il y a du noir et vice-versa. Comme dans la philosophie taoïste. Comme nous, en fait. Même si on vient de l’ombre et de l’obscurité, on tente de faire passer des choses positives.

New-York

Akhénaton : J’ai découvert cette ville en 1984. C’est là que le hip-hop est né. C’est la source. Lors de mes premiers voyages, je prenais un peu plus de risques.J’allais vraiment dans les soirées sans pitié où ça tirait de tous les côtés. Aujourd’hui, je fais plus attention où je mets les pieds. J’ai 28 ans et un enfant. Mais y aller, pour nous, c’est toujours l’occasion de nous ressourcer. On y achète les disques, on écoute les sons du momoent. Bref, on en prend plein les oreilles! En plus, les studios sont deux fois moins chers qu’à Paris. Pour L’école du micro d’argent, on s’y est enfermé pendant quatre mois. C’était un peu long. Marseille me manquait, par instants. J’ai besoin de ses collines, de la mer, des sardines grillées, du sport avec des potes. Mais pour bosser sur un album de rap, entre New-York et Paris, il n’y a pas photo!

Wu-Tang Clan

Akhénaton : L’album solo de Raekwon comme le premier cédé du Wu-Tang Clan sont des références pour nous. On travaille comme eux : on cherche à sortir à la fois des albums solo et collectifs. Mais on a pas voulu coller à la mode Wu-Tang en invitant certains de ses membres sur La saga. Ca s’est organisé naturellement, alors que nous étions en studio à New-York. Comme on a pas calculé non plus en invitant Razhel des Roots. En tous cas, ce type de collaboration prouve que les Français commencent à être respectés aux Etats-Unis. Aujourd’hui, on joue La saga dans les soirées de hip-hop new-yorkaises. C’est quand même la plus belle chose qui puisse arriver à un groupe de rap français.


Jean Christophe Servant et Jacques Denis du magazine XL

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