[Ouest France] Rapper à l'âge mur, ce n'est plus si dur (interview Shurik'n)

On peut désormais vieillir dans le hip-hop, qui a longtemps écarté ses gloires passées. Une réalité en France aussi. Pour ses acteurs de la première heure, c'est même devenu une évidence. « Le rap s'est incrusté dans le panorama, souligne Shurik'N, un des leaders d'IAM. À l'égal de la soul, du blues ou du rock. Des musiques où l'on voit des artistes de 70 ans à qui on ne pose pas la question de l'âge. »

À 46 ans, le Marseillais, vingt-cinq ans de carrière, sortira fin avril son deuxième album solo, Tous m'appellent Shu. Se faire rare, un gage de durée ? « Je n'ai jamais eu la volonté de développer une carrière solo. J'ai toujours considéré que c'était une aire de repos sur l'autoroute IAM. » Au contraire, le secret de sa longévité artistique résiderait plutôt dans une course frénétique. « Depuis Saison 5, nous sommes sur la route avec, en moyenne, deux concerts par mois. » Cinq ans que ça dure. « On continue avec cette insouciance de notre jeunesse à faire ce que l'on aime. »

Un rap pour adultes

Pour Dee Nasty aussi. À 51 ans, le DJ est regardé comme l'un des pionniers du rap en France. Il court de soirée en soirée, avec la même énergie. « Je suis musicien. C'est ma passion avant que le hip-hop n'entre dans ma vie. J'ai fait ce choix, et je m'y suis tenu. »

Il se sait regardé comme « un vieil ado attardé », mais il veut poursuivre sa « mission », malgré un physique moins résistant. « Avec les maisons de disques et les radios, qui maintiennent le genre dans un côté juvénile, j'essaie de me battre pour un rap pour adultes. »

Au quotidien, Dee Nasty anime une émission sur RFI, Global Hip-hop. Et s'amuse de son avenir incertain. « Dans les futures maisons de retraite, il finira bien par y avoir des gens qui auront grandi avec le hip-hop. Avant d'envisager de vendre ma collection de vinyles dans les brocantes, je pourrais être leur DJ. Sinon, on finira bien par monter un Buena Vista Social Club du hip-hop. J'en serai. »