mardi 24 avril 2012

[Métro] Shurik’N : "C’est un peu comme si je débutais à nouveau"


Shurik’N

Pourquoi avoir attendu 14 ans avant de sortir un deuxième album solo ?
Je n’ai pas attendu. Je n’ai jamais été dans l’optique de lancer une carrière en solo. Je fonctionne à l’envie. Le premier, je l’avais fait pour me prouver que je pouvais tout faire tout seul. Ensuite, les projets se sont enchainés avec le groupe… C’est vrai que, de son côté, Akhenaton a sorti quatre albums solo. Moi du mien, j’ai entièrement écrit et composé l’album de Saïd. Et j’ai fait beaucoup de featurings.



C’est donc un choix de ta part de privilégier le collectif ?
Je suis un animal de meute. J’aime bien l’effet de groupe, l’émulation quand on rassemble nos forces. Mais c’est paradoxal parce que je suis aussi très solitaire. Je ne travaille pas pour moi. Je dois avoir une âme de coach. (rires) Je n’aime pas trop la lumière. C’est mon tempérament , je suis un mec à l’ancienne. Avant même de faire du rap, je n’aimais pas me faire remarquer. Maintenant, avec le métier que je fais, c’est sûr que je suis un peu maso, mais j’aime la musique. Je suis un passionné. Le hip hop m’a permis de faire beaucoup de voyages et de rencontres.



Et comment l’envie de travailleur seul revient pour cet album ?
On était sur la route avec le groupe. C’est dans la dynamique de la tournée que plein d’idées ont fusé. J’ai commencé par jouer mes trois premiers nouveaux morceaux sur scène, j’ai vu qu’il y avait du répondant… Puis c’est aussi venu à force d’entendre les gens me parler de mon premier album.



On te parle encore de "Où je vis", sorti en 1998 ?
Oui, énormément. Parfois, ce sont même des gens très jeunes, qui devaient avoir cinq ans au moment où il est sorti. Ça me touche beaucoup parce qu’ils me parlent des mots, me citent des textes… Le disque a vraiment été retenu comme je voulais qu’il le soit. Je dis souvent à ma femme que ce genre de reconnaissance, c’est ce que j’ai toujours recherché durant ma carrière. A la limite, le reste n’a aucune importance.



Lorsqu’on avait demandé à Akhenaton, il y a un peu plus d’un an, pourquoi tu n’avais pas rejoint son nouveau label en ligne (Me-Label, ndlr), il avait répondu : "C'est compliqué. Il n'a pas de studio ni d'endroit pour le beatmaking, il n'est pas assez autonome. Il y travaille, parce que ce que lui proposent les majors ne lui convient plus, mais ça met du temps". Est-ce que c’est toujours d’actualité ? 
Non, ça y est. L’autonomie, j’y suis. Mon album et les clips ont été entièrement payés de ma poche. Par choix et par contrainte. J’ai fait ce disque quand j’en ai eu envie. Et comme je ne voulais pas attendre d’avoir des réponses (des maisons de disque, ndlr), j’ai tout fait moi-même



Comment vis-tu le fait de te retrouver à bosser en indépendant après 25 ans de carrière dans l’un des deux groupes les plus emblématiques de l’histoire du rap français ?
Je trouve ça normal. Le marché du disque a beaucoup morflé… Depuis toujours, on dit que s’il faut retourner à la cave pour faire de la musique, on le fera. Ce n’était pas pour faire joli. Là, on y est. Dans le monde de la musique, on a un certain statut, mais on n’a pas les moyens qui vont avec. Le rap est une musique beaucoup moins considérée. On le voit dans les programmations radio, les magazines spécialisés qui ont disparu. Les temps sont durs pour tout le monde. Après, il faut savoir ce qu’on fait. Est-ce que parce que c’est dur on s’arrête ? Moi au contraire, ça me stimule. C’est un peu comme si je débutais à nouveau. Je suis prêt à retourner faire des mixtapes.



Dirais-tu de cet album qu’il est plus pop que le précédent ?
Il est plus soul, avec beaucoup de mélodies, quelques refrains chantés. Mais ce disque est surtout beaucoup moins sombre que le premier. Il s’est passé beaucoup de choses dans ma vie depuis 14 ans, il n’est pas interdit qu’il y ait quelques contradictions. Autant j’ai plus de recul pour relativiser certaines choses, autant je suis beaucoup plus inquiet envers d’autres sujets. J’ai un regard plus large, ce qui se ressent aussi dans ma façon d’écrire. Après, je ne rappe pas différemment en solo d’avec IAM. On y retrouve les thèmes que j’affectionne, beaucoup d’observation du comportement humain, en essayant toujours d’avoir une écriture imagée.



Quel regard porte l’ancien que tu es sur le rap actuel ?
Il faut dire ce qui est, le rap est tombé dans la consommation rapide. Il est à l’image de la société, plus dans le contenant que le contenu.



Comment expliques-tu que, parmi tous ceux qui ont explosé durant les années 1990, si peu aient pu surmonter le tournant des années 2000 ?
Si j’avais la recette du succès, on serait en train de faire cette interview au Bahamas. (rires) Chaque groupe a sa propre histoire. On se concentre sur nous-mêmes, en nous montrant très exigeants, sans jamais tomber dans la facilité. Pour évoluer, il y a aussi une démarche personnelle à effectuer, chercher des idées, prendre certains risques, aller au bout des choses… Après "Je danse le Mia", les gens n’ont pas compris ce qu’on faisait quand on est revenu avec "L’école du micro d’argent". On s’est affranchi du carcan.



Marseille est-elle toujours vraiment une ville de rap, comme on le disait à l’époque ?
Bien sûr. Plein de groupes comme la Fonky Family et le 3ème Œil se sont éparpillés en même temps, à cause de problèmes internes ou de choix dans leur direction artistique qui leur sont propres, mais aujourd’hui il y a des dizaines de groupes qu’on ne connaît pas à Marseille. Ils n’y arrivent pas, parce qu’ils se contentent de se filmer avec un iPhone pour mettre ça sur le net. Ils ont deux albums, des clips, mais s’ils font trois scènes dans l’année, c’est un miracle.



Peux-tu nous parler du prochain album d’IAM, en hommage à Ennio Morricone, qui est en préparation ?
Il arrivera début 2013. On a fait des sélections d’instru, et on commence tout juste à écrire les premiers morceaux.

Est-il au courant du projet ?
Il a donné son accord après avoir écouté le premier morceau fini. Je ne sais pas s’il aime le rap, mais il a aimé ce qu’on lui a proposé. On aimerait bien aller le rencontrer à Rome, pour essayer de l’impliquer en travaillant avec lui sur quelques titres. Après, ce sera surtout un travail de sampling. On va complètement s’inspirer de son œuvre, reproduire ses atmosphères. On compte même utiliser les titres des morceaux comme sujets de textes. On revient à un album conceptuel, avec beaucoup de visuel. Il y a encore plein de choses à faire. On va bien s’amuser.



Freeman est toujours fâché ?
Depuis qu’il a quitté le groupe il y a quatre ans, oui. On n’a plus de nouvelles. Qu’est-ce que tu veux faire ? Tu ne peux pas l’attacher.

L'avis de Métro:
Quand votre premier album fait figure de mythe, 14 ans ont beau passer, la comparaison est inévitable. Mais Shurik’N n’en a cure, livrant un opus aux sonorités soul très mélodieuses, loin du rap strict de ses débuts en solo. Il conserve cependant l’écriture désabusée qui le caractérise, où les références à l’actualité se conjuguent à sa propre sensibilité, sans jamais tomber dans le moralisme ni la nostalgie gratuite. Ce qui fait de ce disque une sorte de refuge, où le fait de vieillir n’aurait que du bon. Notre avis : 4/5

13 commentaires:

  1. Pour ceux qui ont déjà l'album, est ce que il y a les paroles dans le livret??

    Cimer le gens ;-)

    Pierrot.

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    1. NON,j'l'ai acheté pour soutenir.
      FRED

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  2. non pas les paroles malheueusement, il va falloir ecouter des dizaines de fois pour maitriser tous ces mots ! mais en tt cas, c du bon ! laure.

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  3. Shurik'n 25 ans de carrière et toujours droit comme les pyramides !

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  4. Yannick publiera les paroles sur le blog.

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  5. Yannick, pour info, tout l'album de shurik'n est sur youtube, 2 jours après sa sortie..c'est abusé
    tu devrai en parler à shurik'n pour qu'il supprime

    Je sais que beaucoup de personne préfèrent l'écouter gratuitement avant de l'acheter, mais malheureusement sur 100 personnes, je suis sur que 80 se contenterons de prendre l'album sur youtube

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    1. on peut rien faire contre ça malheureusement et c'est pareil pour tous les artistes de nos jours. Shu s'en est plutôt bien sorti au niveau du leak et la réception est positive. Dis toi bien aussi que les gens qui se contentent de you tube et télécharge ne l'auraient jamais acheté, donc c'est pas si grave.
      FRED

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  6. nouvelle itw video yannic ;-)

    http://www.youtube.com/watch?v=5YXgo7uSNjc&feature=player_embedded

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  7. Et bhé, on les entend plus ceux qui disaient que la promo etait inexistante :D
    Je commence a aimer l'album çayé jsuis content

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    1. maintenant on entend les déçus ;-)

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    2. en même temps l'album est sorti donc OSEF maintenant et les personnes dont tu parles (dont moi) ont surement acheté l'album.

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  8. Mouais, d'un côté je suis désolé mais SHU m'a déçu. Un rap en deux temps cet album, franchement dégouté, plusieurs années que j'attends pour aboutir à çà, je l'ai acheté mais bon. Prods très moyennes, et puis m****, plus AUCUNE verve dans ses versets, Shu tu t'es éteins. RIP! DÉGOUTÉ, t'étais mon rappeur préférer, celui par qui le beat prenait une tournure magique, tu l'es toujours mais en oubliant tes dernières années...

    Saba de Strass.

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  9. de strass aussi, shu ... que s'est il passé ? manque d'inspiration ? dépassé ? je suis déçu 14 ans pour ça ... je préfère rester sur ton 1er album

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