Membre fondateur de la formation mythique IAM, pionnière dans le
milieu du rap dans l’Hexagone, Shurik’n sort l’album Tous m’appellent
Shu. A l’occasion de sa première tournée solo, l’artiste sera samedi à
l’Atabal, pour un concert qui reprend l’ensemble de son répertoire.
Est-ce que tu peux nous présenter ce second album solo ?
C’est un second album qui arrive 14 ans après le premier, D’où je
vis. Il y a eu une longue période de gestation, j’ai commencé à gratter
les premiers textes sur la route avec IAM il y a environ deux ans et
demi. Par rapport au premier, cet album est plus lumineux, vu le
contexte différent dans lequel il a vu le jour, et une évolution
personnelle et musicale. L’album est né dans une dynamique de tournée.
On a décidé avec le groupe de tourner en continu. De cette dynamique
d’échanges naissent de nombreuses idées et concepts, beaucoup de
plaisanteries aussi. L’album a ainsi germé dans ma tête. Autre
différence par rapport au premier album, je ne l’ai pas tout fait seul
au niveau musical, je me suis entouré de DJ’s. Le challenge, car il en
faut bien un, a été de pénétrer leur univers et d’y trouver un espace où
je puisse m’exprimer. Je souhaitais dès le départ jouer cet album sur
scène, une épreuve suprême pour tout artiste, un retour direct sur son
travail. La scène reste l’essence, la finalité de tout groupe. Autre
chose dont j’ai pris tardivement conscience, au-delà des chiffres et des
ventes du premier album, c’est que les gens l’ont porté super longtemps
dans leur cœur. En tant qu’artiste, tu mets tes tripes pour faire un
album, mais le processus de création est un acte égoïste. On se rend
compte au final que le résultat ne nous appartient plus, et les gens
vont lui insuffler la vie ou pas.
Tu reviens toujours à IAM, ils sont présents sur l’album,
alors pourquoi ce besoin d’album solo ? Montrer une partie plus intime
de toi-même ?
Je me suis toujours pensé comme un animal de meute, mais de temps en
temps, j’ai mon côté tigre, où je pars tout seul dans la jungle.
J’exprime alors des choses plus personnelles, que je ne peux pas imposer
ça à six personnes. Après, nous sommes ensemble depuis 24 ans, avec
IAM, ils sont omniprésents dans mon quotidien.
Tu déclares dans une interview récente déplorer le manque de culture hip-hop chez les jeunes.
Je ne le déplore pas, c’est juste différent. Je déplore que la vie,
de par l’évolution de la société, soit aujourd’hui perçue différemment.
Avec IAM, nous sommes encore du côté de la hip-hop culture. On a
conscience que ce que l’on fait entre dans une discipline beaucoup plus
grande que ça, au même titre que la danse, le graff, le DJing. Pour
nous, avoir un micro, c’est savoir faire la fête, parce que le rap, à la
base, c’est des “bloks party” et non des DJ’s. Autre aspect qui nous
intéresse, le côté journaliste urbain, le côté prise de position. La
nouvelle génération, bien que connaissant sa culture et la convenance de
son art, est plus dans le rap en tant que musique tout simplement.
C’est le constat que tu fais de l’état actuel du rap dans l’Hexagone ?
Force est de constater qu’une direction a été prise, et qui n’est pas
forcément la nôtre. Dans notre société, on a commencé à tomber dans un
rap d’emballage, de forme plus que de fond. Après, je ne dis pas qu’il
ne faille que l’un ou que l’autre, mais que les deux soient représentés
de manière égale. Et pas qu’on essaie de nous faire croire, après 25 ans
de présence dans le panorama musical français que le rap ne reste
qu’une musique “bling-bling” avec des filles pleines de cellulite sur
des capots de bagnole.
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