Comme vous le savez, j'ai eu la chance d'interviewer, il y a quelques semaines, Chill pendant plus de 30 minutes. L'échange structuré autour de 3 questions est largement sorti de son cadre pour commenter l'actualité du groupe et celle de l'artiste (voir les posts précédents sur l'album d'IAM, MeLabel et We Love New York).
Voici l'interview originel:
Le blog : tu te tournes de plus en plus vers des modes d'expression artistique plus "longs" (la web TV, le cinéma, le livre, la poésie) avec lesquels tu sembles pouvoir détailler tes opinions et tes combats. Le format "chanson" te semble-t-il limité pour exprimer les idées les plus matures?
Akhenaton: C'est une question intéressante parce que ce sont des interrogations que je me pose. En fait, réellement non! Sauf que le format chanson n'est pas interprété et lu de manière attentionnée comme peut l'être un livre ou la lecture d'un propos direct et prosaïque. Très souvent, le grand public fait superficiellement attention aux paroles des morceaux. C'est pour cela que j'ai répété tout au long de la promotion de La Face B que le livre était une extension prosaïque de ce que j'ai déjà raconté dans les paroles. Tout est dit dans les paroles, je n'ai pas ramené de nouveaux sujets. Cependant, il est vrai que dans les paroles le propos est plus difficile d'accès car plus métaphorique.
Ces nouveaux moyens d'expression sont, pour moi, une question de survie car il y a un risque lorsque tu fais un art marginal de ne pas être compris. Grâce à ces nouveaux moyens d'expression, tu peux même arriver à mettre en lumière certains de tes textes, de tes prises de parole ou expliquer tes erreurs. Pour moi, le plus bel outil que j'ai eu ces dernières années est certainement Cosca Network. Grâce à Akh Web TV ou le travail de Nadia & Bouga, nous avons pu dire beaucoup de choses. Economiquement c'est dur, ces sites sont entièrement financés et ne générent aucun revenu (NDLR car aucune publicité). Je redoute le jour où l'on ne va plus pouvoir conserver cette plateforme (NDLR pas pour tout de suite je vous rassure) car c'est essentiel pour notre communication.
2) L'ouverture de MeLabel marque-t-elle la fin des sorties d'albums pour Akhenaton? Avec un titre par mois et la sortie de projets d'envergure tels que Conte de la frustration (ou We love New York), des albums solos vont-ils pouvoir s'intercaler?
Akhenaton: Je suis content de pouvoir répondre à cette question. Il faut surtout pas ! Tu ne peux pas faire un extrême, il faut travailler aux deux extrêmes. J'en ai parlé il y a quelques jours avec Fabien et Aïsha et je leur disais qu'il faut absolument continuer à sortir des albums de manière classique, même s'ils sont plus rares, il faut le faire. Je veux bien sortir des albums dans une grande maison de disque (NDLR car les structures d'AKH ferment doucement) mais je ne souhaite pas avoir le boulet au pied, les chaînes aux mains et le fouet qui tape dans le dos. Je connais trop le métier "en liberté" donc je demande le minimum au niveau de l'indépendance.
(site officel d'Akhenaton)
3) Tu es aujourd'hui invité sur l'ensemble des plateaux TV et radio pour expliciter ton parcours et tes idées. Tu es donc clairement populaire. Mais comment expliquer que ces mêmes médias ne diffusent pas tes morceaux?
Akhenaton : C'est une question à laquelle je pense pouvoir apporter une réponse. Les gens qui travaillent dans les radios ou à la télévision au niveau de la programmation sont mis sous pression par les annonceurs (alors que l'accueil de nos morceaux est souvent très positif). Les radios ont donc peur de programmer la musique d'IAM car les annonceurs pensent que le Hip Hop s'adresse à un public "sans argent". C'est l'a-priori bête et méchant français qui sous entend que les gens qui écoutent du rap n'ont pas un rond, squattent en bas des blocs et disent "Nique ta ...". Ils n'arrivent pas à comprendre que la jeunesse de France, issue des quartiers ou des zones résidentielles, écoute du rap car c'est rentré dans les moeurs. Les annonceurs disent qu'ils ne veulent pas que du rap soit programmé en radio car cette musique s'adresse à une cible à faible pouvoir d'achat. Tu as beau vouloir innover ou faire évoluer les mentalités, tout est lié à des enjeux économiques.
A l'époque de l'Ecole du micro d'argent, il n'y avait pas une radio que ne jouait pas les morceaux d'IAM. A cette époque là, la variété française était en décrépitude et ces stations se sont tournées vers le rap pour passer de la chanson française.
Merci beaucoup à Aïsha d'avoir permis et organisé cet entretien !
merci pour l'interview, c'est cool de ta part
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